Le Moyen Orient s’embrase de jour en jour et nos médias véhiculent un nombre incalculable d’informations souvent peu comprises du grand public. Parmi celles-ci, les appellations « sunnite » et « chiite », comme le « Hezbollah libanais », une milice politico-religieuse chiite, ou encore le « Hamas » affilié historiquement aux Frères musulmans.
À l’instar du Hezbollah libanais, une milice politico-religieuse chiite ou encore le Hamas affilié historiquement aux Frères musulmans. Notre but est donc d’apporter certains éléments de réponse, afin que le lecteur soit averti et conscient des réalités qui l’entourent.
Les chiites représentent à ce jour 10 à 15 % de la communauté musulmane à travers le monde. Cette fraction de l’islam est née des querelles liées à la succession de Mohammed après sa mort. Néanmoins, historiquement, c’est au XVIe siècle que la branche la plus rigide du chiisme (le chiisme duodécimain) obtient un bastion par la conversion de l’Iran à ce courant de manière généralisée lorsque l’Iran se convertit totalement à ce courant par les séfévides, l’une des dynasties les plus influentes et significatives de l’Iran (1501-1736).
Les chiites duodécimains (la majorité) croient en une lignée de 12 imams à la suite de Mohammed, ceux-ci étant issus directement de sa lignée et ce, à partir d’Ali, le gendre du Prophète et son naturel successeur. À l’inverse, les sunnites, quant à eux, revendiquent comme successeur d’abord Abou bakr, Omar, Othman et seulement Ali en dernière position.
Le dernier de ces 12 imams est celui que l’on nomme al-Mahdî al-Mountadhar ou le « guide attendu », un imam caché qui, selon certaines doctrines chiites, serait disparu à Samara en 874, mais qui, selon la doctrine, vit caché et doit réapparaître avant la fin des temps à la tête de l’armée musulmane pour vaincre les forces du mal et faire régner la justice sur terre.
Le principe d’Imamat ou « suivi du leader religieux » complète l’apostolat de Mohammed. La révélation devient donc une histoire de famille (ahlou al-bait) et de succession. Ces 12 imams sont des êtres préservés de l’erreur envers qui les fidèles doivent allégeance, amour, dévotion et obéissance. C’est la raison pour laquelle cette branche du chiisme a pour pratiques une multitude de pèlerinages à l’effigie de leurs imams et vers leurs tombeaux, en Irak (notamment à Nadjaf et Kerbala), en Iran (à Qom et Mechhed), mais aussi en Arabie saoudite (pays sunnite conservateur).
Concernant leur pratique des cinq piliers de l’islam, comme la prière quotidienne, le jeûne du mois de ramadan ou encore le pèlerinage annuel à La Mecque, ils différent sur certains points avec les quatre écoles jurisprudentielles du sunnisme
En 632, le décès de Mohammed soulève la question de sa succession : qui prendra la place de « commandeur des croyants » ? Car le Prophète n’a pas désigné formellement son successeur, n’a laissé aucune indication sur la manière d’organiser sa succession, et n’a pas même préparé les hommes à son absence. Ce vide juridique va assener un coup de massue sur sa propre communauté et entraîner divisions et conflits au sein de ses propres compagnons ! En effet, une partie des musulmans préconise la légitimité divine : la succession doit se faire sur le modèle de la « famille ». Aussi, seuls les successeurs directs de Mohammed peuvent prétendre à ce statut, à commencer par son gendre Ali ibn abi Talib, suivi de ses enfants Al Hassan et Al Houssayn.
Mais tous ne sont pas de cet avis et Ali se retrouve confronté à une opposition forte. Les affrontements entre compagnons éclatent, mêlant parfois Aïcha, la femme préférée du Prophète. La sanglante bataille dite « du chameau » (en 656), à Bassora, en Irak, est déclenchée par le refus d’Ali et de son parti d’aller immédiatement venger l’assassinat du troisième calife de l’islam Othman ibn Affan. Certains estiment le nombre de morts à 13 000, d’autres avancent le chiffre de 30 000 pertes humaines !
Le célèbre ex-mufti d’Arabie saoudite, le cheikh Abdoul Aziz ben Baz (1912-1999), dit sur son site : « De cette manière, les chiites sont eux-mêmes divisés en plusieurs groupuscules et tous ne sont pas égaux en termes d’égarements, certains sont pires que d’autres et, parmi eux, les duodécimains (rawafidh du Hezbollah, par exemple), ceux-là mêmes qui représentent l’Iran à ce jour, les imamites prônant la succession des 12 imams, ceux-là sont les pires et la majorité parmi eux ! »
Le très célèbre Mohammed Salih al-Mounajid déclare : « Les chiites duodécimains sont de toute évidence des fractions égarées ; en effet, leurs croyances contiennent la fraude, l’athéisme, l’idolâtrie et bien d’autres choses. » Autrement dit, ce savant musulman contemporain leur reproche plusieurs aspects :
— la croyance selon laquelle le Coran a subi une falsification ;
— le fait de considérer l’immense majorité des compagnons de Mohammed comme apostats, à l’exception d’un petit groupe ;
— le fait de considérer leurs 12 imams comme infaillibles, et de leur attribuer la connaissance de l’invisible et de la destinée.
— leur exagération à l’égard des tombeaux et autres lieux.
Quant à Ibn Hazm (XIe siècle), il affirma dans sa pseudo réfutation à l’égard des chrétiens : « Quant à la parole des chrétiens disant que les duodécimains croient en la falsification du Coran, alors nous leur répondons que ces chiites ne sont pas musulmans à notre égard à nos yeux ! »
Ces éléments de réponse nous permettent de mieux comprendre :
— l’étrange relation (chien-chat) existant entre l’Arabie saoudite et sa monarchie salafiste et l’Iran qui promeut un islam chiite duodécimain ;— le conflit opposant l’Arabie saoudite et les houthis du Yémen, affiliés eux aussi à la mouvance chiite duodécimain ;
— le Hezbollah libanais qui est au service de la politique iranienne et partage largement ses convictions doctrinales !
Négliger cette connaissance ne permet pas de comprendre l’essence même de certains conflits, car là où le territorial et le politique se dressent, le religieux finit par en donner le motif ultime !