Le salafisme est basé sur une vision puritaine de l’islam et prône un retour strict à la doctrine des salafs ou les trois premières générations de l’islam sunnite. Il interprète le Coran et la tradition (Sunna) selon la voie (minhaj) des pieux prédécesseurs (as-Salaf as-Salih). L’un des principes majeurs de ce mouvement est l’application stricte de la charia, supérieure à tout autre système de législation. Il met également en garde contre les hérétiques et les hérésies apparues dans l’histoire de l’islam.
Le salafisme se décline actuellement en deux mouvements : l’un, dit « quiétiste », ne s’engage pas dans la vie civile ou politique, patientant devant la faiblesse actuelle des musulmans à travers le monde. Il privilégie la recherche en science théologique, l’éducation des musulmans à la doctrine salafiste et l’attache à ses partisans (cheikhs), avant de lancer un jour le jihad offensif qui doit être initié par un gouverneur « légitime » à ses yeux. L’autre, dit « jihadiste », va privilégier la lutte armée et établir un califat pour se lancer corps et âme dans la « guerre sainte ». Ne reconnaissant pas la légitimité des gouverneurs musulmans qui ne jugent pas selon la charia, il les rend, de ce fait, apostats (kouffars).
Ce courant a connu plusieurs réformateurs au fil des siècles, notamment l’imam Ahmed Ibn Hanbal (780-855), ibn Taymiyya (1263-1328) ou, plus récemment, Mohammed Ibn Abdelwahhab (1703-1792).
Présent essentiellement dans les pays pétroliers du Golfe et principalement en Arabie saoudite, le salafisme des XXe et XXIe siècles compte parmi ses « savants » l’éminent ex-mufti du royaume saoudien, le cheikh Abdoulaziz ibn Baz, le cheikh albanais Muhammad Nasir-ud-Din al-Albani, et bien d’autres.
Ce groupe politico-religieux fondé en Égypte par le théologien Hassan el Banna au XXe siècle (1928) se distingue par son intrusion très forte en politique. Il se fonde sur certains cheikhs salafistes, mais mélange leurs pensées avec d’autres courants religieux opposés, allant même parfois à l’encontre du sunnisme (collaboration avec les chiites iraniens, etc.).
Chez les Frères musulmans, la règle en vigueur pourrait se résumer à « la fin justifie les moyens » : s’il est possible, par la politique et l’œcuménisme, de faire triompher l’islam et le jihad armé, alors ils emprunteront ce chemin, leur objectif officiel étant la renaissance islamique, la diffusion internationale de la charia et la suppression de tout autre système de législation en vigueur. La lutte contre l’État d’Israël est au cœur de ce mouvement.
Élu démocratiquement en 2012, Mohammed Morsi devient le premier président civil égyptien appartenant officiellement aux Frères musulmans. Si cette organisation est parfois considérée comme un mouvement terroriste, les Frères musulmans sont implantés partout dans le monde, y compris sur la scène politico-religieuse (Tarik Ramadan est d’ailleurs le petit-fils du fondateur Hassan el Banna). Le Hamas palestinien s’en réclame fièrement et sans ambiguïté !
Tout comme la Turquie et la Tunisie, le Qatar se veut être un allié direct de ce mouvement, dont il a d’ailleurs accueilli le célèbre théologien Youssef Al-Qaradawi (1926-2022), après avoir été déchu de sa nationalité égyptienne. Le conflit, parfois visible, opposant l’Arabie saoudite et son voisin le Qatar est uniquement dû à leur différente affiliation, la première étant orientée vers le salafisme, le second vers les Frères musulmans.
Le chiisme, majoritaire en Iran et en Irak, représente environ 15 % de la communauté musulmane mondiale. Son origine remonte à la mort du prophète Mohammed et au problème de sa succession. Si les sunnites estiment que l’autorité devait revenir d’abord à Abou Bakr, le compagnon préféré de Mohammed, puis à Omar, à Outhman, puis seulement à Ali, le gendre de Mohammed, les chiites, eux, considèrent au contraire que cette succession est une histoire familiale : Ali et la famille de Mohammed sont les seuls successeurs légaux après la mort du Prophète (douze imams qui se succèdent jusqu’à la venue du dernier, « l’imam al Mahdi »).
Outre La Mecque, Médine et Jérusalem, les lieux saints chiites sont également Nadjaf et Kerbala en Irak où reposent des membres de la famille du Prophète.
Le chiisme est lui-même divisé en trois grands groupes : les duodécimains (majoritaires), les ismaélites et les zaydites. Certains courants chiites remettent en cause la divinité du Coran ainsi que sa préservation.
L’islam chiite refuse la Sunna (tradition) et les sources du sunnisme orthodoxe (Boukhary, Mouslim). Il produit ses propres récits, comme le célèbre Al-Kafi, un recueil de hadîths écrit par le théologien perse Mohammed Ibn Yaqub Kolayni (864-940).
L’ash’arisme est une école théologique issue du sunnisme, fondée par Abou Al Hassan Al Achari (873-935). Elle est souvent présentée comme une théorie du « juste milieu », une voie entre les traditionalistes (salafis) et les mutazilites (groupe déviant, principalement sur les attributs divins). Al-Hayy Ar-Rajshahi a résumé le dogme ash’arite au sujet des attributs d’Allah et de son être par ces mots : « Selon les ash’arites, Allâh est Un, Unique, Éternel et est un Être existant. Il n’est pas une substance, ni un corps, ni un accident, ni limité par une quelconque direction et ni contenu par un quelconque espace. Il possède des attributs tels que l’omniscience, la toute-puissance, la vie et la volonté. Il est entendant, voyant et est doué de la parole. »
Al-Hayy Ar-Rajshahi a fortifié ces doctrines par des arguments tirés de la théologie dialectique. En effet, il s’est différencié de la majorité des salafs par l’utilisation du raisonnement logique. Les uns lui reprochent d’être un traditionaliste refoulé, les autres l’accusent d’être un innovateur plaçant la raison au-dessus de la révélation.
Les soufis se distinguent par leur quête et leur adoration de Dieu. Ils préconisent le détachement, le jeûne, le silence, la méditation (al-tafakkour) : autant d’éléments qui vont à l’encontre de la vie communautaire.
Mais ce qui inquiète encore plus les docteurs de la loi et les traditionalistes, c’est la réunion des mystiques sous l’autorité d’un cheikh, un maître qui développe une liturgie qui lui est propre et des techniques de méditation particulières, ce qui met en péril leur autorité religieuse et leur compétence de théologiens. Leur méfiance est grande vis-à-vis de cette voie qu’il faut suivre, ces étapes qu’il faut franchir pour atteindre l’union intime totale (ittihad) avec Dieu, qui procure entre autres l’extase et la bienfaisance (al-ihsan).
Cette approche se fait essentiellement sous l’autorité d’un maître dont le rôle est fondamental dans l’initiation. Selon l’un des hadiths (récit attribué a Mohammed) considéré comme faux et inventé par le sunnisme traditionnel, il existerait quatre-vingt-dix mille voiles entre le croyant et la Réalité supérieure, Dieu. L’initiation permet de lever un à un ces voiles qui empêchent d’accéder à la lumière divine. Pour y parvenir, le maître offre des repères à son suiveur (Mourîd). « Celui qui n’a pas de maître a pour maître Satan », disait un grand soufi, l’Andalou Ibn Arabi.
Contrairement au salafisme puritain, le soufisme accepte les innovations religieuses et fête donc l’anniversaire du prophète (Mawlid). Il vénère les tombes des saints (Awlya) et croit en leur intercession auprès d’Allah, ce que le sunnisme traditionnel considère comme une hérésie : le soufisme est donc parfois jugé comme étant du polythéisme majeur, excluant son auteur de l’islam et le rendant apostat.